9.1.09

18 août, lettre à mon frère, Lima, Pérou

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Lima, le 18 août 2008

Mon cher Louis

Je t'écris cette lettre de Lima que tu viens de quitter et où je suis restée. Je t'imagines quelque part dans les aires en train de survoler la Cordillère des Andes. Aujourd'hui, tu as repris l'avion pour retourner dans notre Auvergne chérie et moi je vais continuer mon périple vers le Nord du Pérou. Que te dire, si ce n'est que ces trois semaines de voyage fraternel me laisse autant de beaux souvenirs que de kilomètres parcourus. Entre fierté et nostalgie, je me remémore notre chemin aux pieds des montagnes, de la capitale créole au plus haut lac navigable du monde.

Tu es arrivé avec une question: les voyages forment-ils la jeunesse? On a bien réfléchi à ce problème philosophique tout en pratiquant le bourlingage dans ces espaces lointains. Et alors que tu repars vers l' autre hémisphère, je t'offre ma réponse, une série d'énumérations sans logique, tu prends ce que tu veux et tu contredis le reste.


Sur d'autres terres lointaines, ma chance c'est l'altérité, mon opportunité la différence. Le monde est beau et vaste, la rencontre belle et féconde. Voyager c'est découvrir ce qui n'est pas mon univers familier, quotidien, rassurant, c'est sortir des sentiers battus, remettre en question ma propre culture et l'enrichir d'idées nouvelles. C'est voir avec ses propres yeux ce que les livres racontent et se mettre à l'épreuve de toute réalité. A l'épreuve des paysages merveilleux de la Cordillère des Andes et du lac Titicaca, de la cité ancestrale du Machu Pichu et des villes pétries d'histoire coloniale. A l'épreuve aussi d'une réalité sociale plus chaotique, d'une pauvreté plus dure et de toutes ces inégalités qui scindent la planète. Leçon d'humilité.
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Voyager, c'est aussi apprendre à se connaître soi-même, à ne pas avoir peur de l'inconnu, à se lancer des petits ou grands défis, à mesurer ses craintes et à les affronter. Moi dans la Cordillère des Andes, je me suis sentie toute petite aux pieds des grands volcans qui me dominaient de leur 6000 mètres d'altitude. Et il a bien fallu grimper et se mettre à la hauteur du paysage, marcher au rythme de sa volonté et atteindre le sommet. Et le sommet du Colca on peut bien dire qu'on l'a atteint ensemble.

Voyager c'est se contenter de peu, n'avoir qu'un petit bagage ridicule. Toi t'avais pas grand-chose, mis à part les pantoufles en poil de mammouth et ce grand cahier que tu as traîné partout. Moi j'avais deux pantalons et deux paires de godasses, pas de bijoux, pas de maquillage, pas de jeu d'apparence et pour toute maison un sac à dos d'escargot. Quelque part ce si peu matériel, c'est comme une libération, je sors des pesanteurs d'une société de consommation et d'apparence, ce presque rien c'est ma légèreté en marche et le début de ma liberté.

Voilà mon cher Louis, quelques réflexions au bout de la plume. Voyager nous a permis de mieux nous connaître et de continuer à tisser une belle relation. Solidarité, responsabilité, partage, autant de belles valeurs du compagnonnage des routes.

Merci à nos parents de nous avoir donné la possibilité de parcourir ce petit bout de chemin ensemble. Bon retour au pays natal, prends soin de toi,

Anne



"Viajar no es tan sólo moverse en el espacio. Más que eso, es acomodar el espíritu, predisponer el alma y aprender de nuevo." Ortega y Gasset
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